Naturalisation facilitée pour les étrangères et les étrangers de la troisième génération
Die deutsche Version dieses Beitrags wurde am 20. Oktober 2016 auf diesem Blog veröffentlicht – noch bevor klar war, wann die Vorlage zur Abstimmung kommt.
Parallèlement à la mise en œuvre de l’initiative contre l’immigration de masse et à la réforme de l’AVS, une autre décision du Parlement est passée presque inaperçue lors de la session d’automne. Le Conseil national et le Conseil des États ont approuvé une modification de la Constitution qui vise à introduire une naturalisation facilitée pour les étrangères et les étrangers de la troisième génération. Un assouplissement du très restrictif droit de cité suisse ?
Un examen approfondi du texte montre que les barrières restent toujours élevées pour la naturalisation des jeunes de nationalité étrangère.
« La Suisse doit reconnaître ses enfants »
C’est en 2008 que la conseillère nationale PS vaudoise Ada Marra a déposé une initiative parlementaire intitulée « La Suisse doit reconnaître ses enfants ». Quatre ans après que le peuple avait rejeté la naturalisation facilitée des étrangères et étrangers des deuxième et troisième générations, il s’agissait de soulever de nouveau dans l’arène politique la question d’un accès facilité à la nationalité suisse pour les enfants et les jeunes ayant grandi ici. Cette initiative parlementaire proposait de naturaliser plus facilement les étrangères et étrangers de la troisième génération qui en faisaient la demande. Les assouplissements différents d’un canton à l’autre de la naturalisation pour les jeunes né·e·s en Suisse devaient être uniformisés et la compétence en la matière devait être transférée à la Confédération. Avec la possibilité d’une naturalisation facilitée, les jeunes de la troisième génération devaient être reconnu·e·s comme des « enfants » de la Suisse et donc comme des citoyennes et citoyens jouissant de tous les droits politiques.
Les commissions chargées de l’examen préalable ont souscrit au texte soumis ; mais ensuite, pendant plus de cinq ans, l’objet a disparu de la scène politique. Ce n’est qu’en automne 2014, après la clôture de la révision totale de la loi sur la nationalité, qu’on s’est de nouveau penché sur la question. La Commission des institutions politiques du Conseil national et le Conseil fédéral s’étant tous deux prononcés en faveur de l’idée, l’initiative a été soumise au Parlement lors de la session d’automne 2015. Les deux Chambres fédérales se sont mises d’accord sur les détails et ont approuvé, le 28 septembre 2016, la modification de la loi sur la nationalité (LN) et de la Constitution fédérale (Cst.). Il reste toutefois un gros obstacle à surmonter – l’introduction de la naturalisation facilitée nécessite une modification de la Constitution, à savoir de l’art. 38 Cst., et donc en tout cas l’approbation du peuple et des cantons. Entretemps, la date de la votation a été fixée au 12 février 2017.
En quoi la naturalisation sera-t-elle facilitée pour la troisième génération ?
La réglementation qui vient d’être décidée comprend deux volets. D’une part, le projet prévoit la modification constitutionnelle. À l’avenir, l’art. 38, al. 3 Cst. doit servir de base pour que la Confédération ait la compétence de régler la naturalisation facilitée de la troisième génération d’étranger·ère·s. D’autre part, pour mettre en œuvre ces dispositions au niveau législatif, un nouvel art. 24a LN doit être introduit et régler les détails de la naturalisation facilitée. Les conditions sont restrictives. La naturalisation facilitée d’une personne qui vit déjà en Suisse dans la troisième génération suppose que :
- l’un de ses grands-parents soit né en Suisse ou possède ou ait possédé un droit de séjour ;
- l’un de ses parents dispose d’un permis d’établissement, ait passé au moins dix ans en Suisse et y ait fréquenté l’école obligatoire pendant au moins cinq ans ;
- et que l’enfant lui-même soit né en Suisse, possède un permis d’établissement et ait fréquenté l’école obligatoire en Suisse pendant au moins cinq ans.
De plus, les conditions générales de la naturalisation facilitée selon l’art. 26 LN (art. 20 en combinaison avec l’art. 12 nLN) doivent être remplies. Il est ainsi exigé également que la personne qui fait la demande soit intégrée en Suisse, se conforme à la législation suisse et ne compromette pas la sécurité intérieure et extérieure de la Suisse. Ce n’est que si ces conditions sont remplies que la personne concernée pourra, jusqu’à son 25e anniversaire, faire une demande de naturalisation facilitée. La naturalisation facilitée n’est donc pas automatique à la naissance au sens d’un droit du sol (ius soli). Au contraire, il faut que la personne elle-même, dans ce délai, dépose une demande et présente les documents nécessaires pour prouver – ou établir de manière vraisemblable en ce qui concerne le séjour des grands-parents – que les conditions sont remplies. Les autorités conservent ainsi une grande marge de manœuvre. En outre, la naturalisation sera sans doute relativement coûteuse pour la personne qui en fait la demande, car de nombreux documents devront être déposés à titre de preuves concernant les conditions à remplir.
On est loin d’une acquisition automatique du droit de cité
Avec la réglementation décidée, les obstacles à franchir pour acquérir la nationalité suisse restent élevés. Il existe certes un droit à une naturalisation facilitée pour la personne étrangère de troisième génération, mais la naturalisation n’a pas lieu automatiquement ni à la naissance. Cela correspond à la volonté du Parlement, qui a souligné avec force ne pas vouloir introduire un droit du sol. Le terme de droit du sol signifie que la nationalité est acquise automatiquement à la naissance. On parle de (double) droit du sol quand des personnes de la deuxième génération sont automatiquement naturalisées à la naissance. Au cours des dernières années, de nombreux autres pays européens ont introduit de tels mécanismes de droit du sol permettant aux étrangères et aux étrangers des deuxième et troisième générations d’acquérir automatiquement la nationalité ou de se faire naturaliser beaucoup plus facilement. La Suisse en reste très loin – le mécanisme de naturalisation proposé n’est ni automatique, ni consécutif à la naissance. La naturalisation qui est ouverte aux quelque 5000 étrangères et étrangers de troisième génération que compte notre pays selon des estimations est à peine différente de la naturalisation ordinaire – abstraction faite de la durée de domiciliation de douze ans, une exigence à laquelle les personnes ayant grandi en Suisse satisfont généralement de toute façon. Il faudra voir dans les faits quels allègements apportera la nouvelle disposition pour la naturalisation des personnes étrangères de la troisième génération. En tout cas, étant donné le caractère restrictif de ses conditions, cet objet ne permettra pas de tenir de manière convaincante la promesse de reconnaître enfin les enfants de la troisième génération d’étrangers comme des citoyennes et des citoyens suisses.
Barbara von Rütte
Doctorante, nccr – on the move, Université de Berne
Environ 25% des personnes majeures qui vivent en Suisse n’ont pas le droit de prendre part aux décisions politiques au niveau fédéral parce qu’elles ne sont pas naturalisées et, par conséquent, ne possèdent pas le passeport suisse. Préalablement au vote sur la naturalisation facilitée des personnes étrangères de la troisième génération, prévu le 12 février 2017, le « nccr – on the move » publie une série de billets de blog présentant des données et des faits sur la naturalisation en Suisse.